Red  bay
Sources : http://www.pc.gc.ca

 

Patrimoine naturel :

Le paysage

La région de Red Bay présente de nombreuses caractéristiques des régions du Nord, notamment un paysage de toundra dépourvu d'arbres qui abrite de nombreuses espèces de la flore boréale et alpine. À la toundra se mêle le tuckamore ou bouquets d'arbres caractéristiques tordus par le vent.

Si la côte est surtout rocheuse, plusieurs grandes baies de la région sont bordées de longues plages de sable, résultats de phénomènes géologiques anciens qui ont créé des endroits propices à l'établissement humain.


Paysages de Red Bay
©Parcs Canada/GMNP / F7-1214 / Michael Burzynski
 

La faune

La toundra et la côte abritent diverses espèces d'oiseaux, comme les buses qui nichent dans le flanc des falaises et les guillemots dans les eaux proches du littoral, ainsi qu'une multitude d'espèces végétales, dont beaucoup sont des variantes naines d'espèces qu'on trouve en général dans les zones alpines.

Le rivage est riche en vie marine - entre autres, coquillages, dollars des sables et minuscules bernard-l'hermite. Il est également possible, depuis les belvédères naturels le long de la côte, de voir des baleines sauter et se nourrir au large.

Il est courant d'apercevoir des baleines en été et au début de l'automne. Le rorqual à bosse est l'espèce la plus impressionnante; il se tient en général en groupe et se fait remarquer par son gros dos arrondi et son plongeon typique laissant émerger ses énormes nageoires caudales.

Le rorqual commun est plus solitaire; il est en général seul ou en petit groupe. On le reconnaît surtout au long jet d'air qu'il projette à la surface de l'eau après un plongeon. Parmi les cétacés plus petits qu'il est également possible de voir, mentionnons le globicéphale noir, le petit rorqual et, à l'occasion, l'épaulard. Il n'est pas rare non plus d'apercevoir des marsouins et des dauphins, communément appelés " sauteurs " dans la région.

 

La flore

Plusieurs fleurs sauvages qui poussent dans la région du détroit du Labrador sont des variantes d'espèces appartenant à la flore boréale ou alpine. Les zones sablonneuses proches des plages abritent l'iris à pétales aigus, la gesse maritime ou pois de mer, la potentille ansérine, la campanule à feuilles rondes, la vesce d'Amérique, la mertensie maritime et une plante à fleurs jaunes qui ressemble au tournesol, le sénéçon faux-arnica ou roi des champs. La toundra est le royaume du thé du Labrador, du kalmia à feuilles d'Andromède, du cornouiller du Canada, de la camarine à fruits noirs, du bleuet et de l'airelle vigne-d'Ida, appelée aussi airelle de montagne et graines rouges. Poussent également à certains endroits des espèces moins répandues, comme le saxifrage à feuilles opposées, le silène acaule et l'épilobe glanduleux.

La région du détroit du Labrador est bien connue pour ses chicoutées qui abondent dans les tourbières et les zones humides de la toundra. L'airelle vigne-d'Ida préfère les secteurs plus secs, où elle pousse à profusion. On trouve également des espèces plus rares comme le fraisier des champs et la ronce acaule, aux délicieux fruits sucrés.


Plaquebières
©Parcs Canada/GMNP / F7-472 / Michael Burzynski
   
   

Histoire :

Histoire maritime du Labrador

Cela fait 9 000 ans que les habitants de la région du détroit du Labrador vivent des richesses de la mer. Les peuples préhistoriques chassaient déjà le phoque et le morse le long de la côte et pêchaient le saumon de l'Atlantique dans les rivières. Les bandes d'Autochtones de l'Archaïque et de Paléo-Esquimaux ont appris à exploiter ces ressources maritimes abondantes et ont adopté des techniques et des modes de vie particulièrement bien adaptés à cette exploitation.

Au cours des 400 dernières années, les pêcheurs basques, français, anglais et jersiais sont venus capturer poissons, phoques et baleines pour les exporter sur les marchés du monde entier. Au XIXe siècle, des pêcheurs originaires de Terre-Neuve, d'Angleterre et des îles Anglo-Normandes se sont installés dans le détroit du Labrador; il s'agit des ancêtres des habitants d'aujourd'hui.

Découvrez l'histoire fascinante du détroit du Labrador (en anglais seulement).

Les Basques et la pêche à la baleine au XVIe siècle

Les baleines noires et les baleines boréales, qui abondaient autrefois au large du Labrador, ont attiré les pêcheurs du pays basque au XVIe siècle. C'est ainsi qu'une industrie prospère reposant sur la production de l'huile de baleine s'est développée sur la côte du Labrador au cours de la seconde moitié du XVIe siècle. Le port de Red Bay, particulièrement bien abrité, était au coeur de cette entreprise historique.

Pêcheurs et marins chevronnés, les Basques venaient du coin sud-est du Golfe de Gascogne. Comme les Portugais, ils étaient parmi les premiers venus au Grand banc de Terre-Neuve.

Les Basques contrôlaient la pêche le long de la côte nord-est pendant plus d'un siècle. Tous les printemps jusqu'à environ 1626, ils partaient en bateau pour leurs stations de baleiniers nord-américaines où ils érigeaient des échafaudages pour sécher la morue et construisaient des fours de pierre pour préparer l'huile de baleine, une denrée fort prisée en Europe à l'époque.

Plus de quinze années de recherches archéologiques ont permis de mettre au jour une vingtaine de stations de baleiniers autour du havre de Red Bay. Les fouilles subaquatiques ont mené à la découverte de trois galions et de plusieurs embarcations basques, exemples remarquablement bien conservés des techniques de construction navale employées au XVIe siècle. Les recherches de Selma Barkham effectuées dans les archives basques ont également contribué à jeter plus de lumière sur ces expéditions historiques.

Recherche archaéologique sous-marine à Red Bay
©Parcs Canada/GMNP / O1-151

   

L'histoire d'une baleinière basque du XVIe siècle :

Au cours de la seconde moitié du XVIe siècle, l'huile de baleine était une denrée rare très prisée parce qu'elle produisait une flamme plus brillante que celle des huiles végétales plus répandues. Elle servait également à la fabrication de savon et de produits pharmaceutiques et au traitement des tissus. Vers le milieu du XVIe siècle, les pêcheurs européens obtenaient cette denrée précieuse en exploitant les richesses marines du détroit de Belle-Isle. Les commerçants basques et les armateurs français et espagnols organisaient des expéditions saisonnières à destination de la côte sud du Labrador et de la côte nord du Québec, pour chasser la baleine servant entre autres à la production d'huile. Les bateaux accostaient à Butus, maintenant appelé Red Bay. Recherches dans les archives et fouilles archéologiques ont révélé la présence d'une industrie bien structurée et sans précédent au Canada.

Chalupa

©Parks Canada
                                      
 

Archéologie

Les fouilles sous-marines ont commencé en 1978 et, au cours des six années suivantes, le projet Red Bayest devenu un des plus vastes projets d'archéologie sous-marine jamais entrepris au Canada. La découverte de trois galions basques et de quatre petites embarcations pour la chasse à la baleine en a fait un des sites archéologiques sous-marins les plus précieux des Amériques. Une de ces embarcations, une chalupa de 8 mètres, était coincée sous le côté tribord écroulé d'une baleinière de 200 tonelada . On a dégagé la chalupa pour en faire une description minutieuse avant de la démonter, de la sortir de l'eau, de la conserver et de l'assembler. Ces vestiges vieux de plus de 400 ans ont une grande valeur pour les raisons suivantes :

  • état de préservation exceptionnel des éléments typiquement basques - conception, travail et matériaux des bateaux construits pour l'industrie de la chasse à la baleine;
  • représentatif d'un tournant important de la conception, de la construction et de l'assemblage des bateaux du XVIe siècle;
  • rôle essentiel des chalupas pendant la chasse à la baleine (poursuite, mise à mort et remorquage);
  • représentatif, avec les autres petits bateaux, de l'ampleur et de la complexité du soutien dont avaient besoin les stations de dépeçage.

L'étude de la chalupa a permis d'étoffer les connaissances sur les baleiniers basques du Labrador. La création du lieu historique national de Red Bay reconnaît la valeur historique de la chalupa et sa contribution au réseau des lieux historiques nationaux du Canada. Le 1er juillet 1998, cette embarcation extraordinaire fut retournée à Red Bay où elle est exposée en permanence au nouveau centre d'accueil du LHN de Red Bay.

 
      

Conservation

Les archéologues sous-marins ont consigné tous les renseignements sur les objets mis au jour, puis les restaurateurs du lieu se sont mis à l'oeuvre. Tous les objets ont été entreposés au laboratoire de chantier jusqu'à la fin de la saison des fouilles. À l'automne, les objets ont été emballés et envoyés au laboratoire principal, à Ottawa.

Les restaurateurs d'Ottawa ont utilisé les techniques en usage dans tous les laboratoires de conservation du monde pour préserver la plupart des pièces de bois gorgées d'eau, à savoir :

  • on remplit une demande de restauration pour chaque objet dès son arrivée au laboratoire, puis on l'inscrit au système de repérage des objets.;
  • chaque objet est décrit dans un rapport, puis photographié ou dessiné;
  • on rédige une proposition de traitement qui doit être approuvée;
  • on nettoie la surface du bois à l'aide de brosses à soies souples et d'outils pour soins dentaires; les caractéristiques inhabituelles ou les marques d'outil découvertes pendant le nettoyage sont consignées et signalées à l'archéologue;
  • une fois l'objet nettoyé, on remplace l'eau qui s'était infiltrée dans le bois par une cire appelée polyéthylène glycol (P.E.G.). Le bois a absorbé le P.E.G. lentement parce que les objets ont trempé plusieurs années dans un mélange de cire dissoute dans l'eau. Le P.E.G. a empêché le fendillement du bois pendant le séchage.
  • Pour assécher le bois, on utilise un appareil de lyophilisation sous vide qui retire l'eau des objets congelés, limitant ainsi le rétrécissement pendant le séchage. Ce même procédé est employé pour produire des aliments ou du café lyophilisé (séchés à froid).
  • Notre appareil de lyophilisation sous vide est trop petit pour les bordages plus longs. Ils ont été laissés à l'air libre dans notre congélateur-chambre pendant 18 mois, ce qui a asséché la surface du bois. On dit de la viande gardée dans des congélateurs domestiques qui subit ce traitement qu'elle est « brûlée » par la congélation.
  • On pèse les objets pendant le séchage et, lorsque le poids reste stable, on conclue que le séchage est terminé.
  • On range le bois séché dans un laboratoire à un taux d'humidité relative de 50 p. cent, qui convient le mieux aux matières organiques comme le bois.
  • On brosse la surface et on y passe l'aspirateur. Les surfaces fragiles sont consolidées à l'aide d'une solution de colle blanche diluée. Les fragments qui se sont détachés pendant le traitement sont recollés.

À cette étape, la quille, les membrures, les bordages, les bancs de nage et les plats bords sont prêts à être assemblés pour former un bateau presque intact.

 

Remontage

Le « remontage » d'un bateau fouillé archéologiquement se veut l'étape finale d'un long processus de « reconstruction » amorcé sur le terrain, dès l'apparition sous le sédiment des premières pièces de structure. La numérotation soignée, l'enregistrement et le positionnement précis d'un élément par rapport à un autre sont cruciaux pour les analyses et interprétation ultérieures. Les plans, photos, dessins des pièces et les catalogues qui relient toutes ces données ensemble deviennent les outils de référence principaux aux étapes intermédiaires de la reconstruction. En créant des dessins composites, des tableaux, et même des maquettes de bois, les archéologues peuvent établir la relation entre les pièces et se faire une idée de la forme originale du bateau. Dans la plupart des cas, la reconstruction de navire s'arrête ici. Toutefois, dans celui de la chalupa de Red Bay, on dispose de l'occasion rare de remonter les pièces de structure originales. On doit redonner leur forme à ces pièces pour ensuite les fixer avec soin. L'équipe de ré-assemblage suit donc dans les traces des anciens constructeurs basques tout en utilisant également des méthodes entièrement différentes. Non seulement le résultat est-il une exposition merveilleuse, mais le processus permet à l'analyse d'être portée à son niveau ultime.

 

Quelques éléments de la chalupa à regarder...

  • L'extrémité la plus élevée de l'embarcation est la proue (devant). À noter le trou pratiqué dans l'étrave (pièce verticale de la proue) pour une corde d'amarrage.
  • Les trous verticaux dans les fragments de plat-bord (pièce de structure courant le long du sommet des flancs) montrent l'emplacement des tolets en bois qui tenaient les rames. Celui près de la poupe (l'arrière) recevait la rame pour gouverner.
  • Les deux planches supérieures se chevauchent (à clin) tandis que les planches inférieures ont nivelées (à franc-bord). Ceci nous indique que les constructeurs basques ont su profiter des deux traditions européennes de construction navale, celle du nord (à clin) et celle du sud (à franc-bord), dans un mélange qui était encore utilisé dans les embarcations de chasse à la baleine du XIXe siècle construites des deux cotés de l'Atlantique.
  • Il y a sept bancs de nage (sièges qui servaient également de renforts) dans le bateau, le même nombre inscrit sur la planche gravée.
  • L' emplanture principale est le bloc de bois près du centre de l'embarcation muni d'une ouverture carrée dans laquelle le mât s'emboîtait. Le banc de nage situé juste au-dessus sert aussi d' étambrai de mât supportant le mât verticalement.
  • On retrouve des trous sur la planche supérieure. Ils servent de conduits à travers lesquels passaient les écoutes (cordes fixées au bas des voiles). Les trous sont en fait des trous de noeud du bois utilisés à cause de leur résistance naturelle.
  • Les pièces de structure courant d'un côté à l'autre s'appellent des membrures; la partie de chaque membrure qui croise la quille (la grosse pièce qui court de l'avant à l'arrière) s'appelle la varangue et celles qui courbent vers le haut de chaque côté, les allonges. Ces pièces n'étaient pas façonnées, mais prélevées à même des arbres de la forme voulue.
  • À l'origine, les fixations du navire étaient des clous de fer forgé, souvent rabattus pour travailler comme des chevilles. Nous avons utilisé des chevilles de laiton peintes en noir. Une des extrémités est modifiée pour imiter la pointe rabattue d'un clou, l'autre est chapeautée d'une « tête de clou » en cire.
 

Mourir loin de chez soi :

Les Basques étaient originaires d'une région située dans le sud-ouest de la France et le nord-est de l'Espagne qu'on appelle le pays Basque. Par tradition, ils étaient bergers, constructeurs de bateaux et pêcheurs; ils pratiquaient également la chasse à la baleine dans les mers septentrionales depuis des temps immémoriaux. Personne ne sait au juste quand ils ont visité le Canada la première fois, mais certains vestiges donnent à penser que des pêcheurs basques pêchaient et séchaient la morue au large de Terre-Neuve depuis le tout début du XVIe siècle. Même s'ils ont continué à pêcher la morue, la demande croissante d'huile en Europe a fait de la chasse à la baleine une entreprise beaucoup plus profitable. Au moment où Joanes fait son testament, Red Bay est considérée comme le plus grand centre de chasse à la baleine au monde!

Des baleiniers basques
Geneviève Després
 
Les hommes arrivaient au printemps, bien équipés pour la chasse à la baleine, ce qui ne faisait guère plus que les vêtements qu'ils portaient. L'un d'eux se mettait aussitôt à faire le guet, tandis que les autres réparaient les abris et les stations de dépeçage qui avaient subi les rigueurs de l'hiver. Quand des baleines étaient repérées, deux bateaux ou plus sortaient les harponner. Les animaux étaient ensuite remorqués près de la rive, où les hommes travaillaient jour et nuit à faire fondre la graisse pour la transformer en huile. Le harponnage des baleines était un travail très dangereux, mais ceux qui l'exécutaient jouissaient de privilèges financiers et sociaux. À l'époque, l'huile était une denrée rare et on a estimé la valeur d'un baril d'huile de baleine à 5000 $ en dollars actuels. Dès janvier, l'hiver forçait les hommes à retourner en Europe.
Après 1600, les baleiniers basques ont peu à peu cessé de venir au Canada. Des fouilles archéologiques récentes menées à terre et sous l'eau ont permis de mettre au jour des vestiges de stations de dépeçage basques. La découverte la plus remarquable est celle d'une épave qu'on croit être le San Juan, un galion basque qui a coulé à Red Bay en 1565. Ce navire, le plus vieux jamais découvert en Amérique au nord du golfe du Mexique, est jusqu'ici le mieux conservé des bâtiments espagnols de l'époque.
Le lieu historique national de Red Bay, au Labrador, expose une partie des artefacts découverts par les archéologues et permet aux visiteurs d'explorer les lieux où ces stations de dépeçage s'élevaient jadis.

Une partie du San Juan
découvert à Red Bay

© Parcs Canada
» Nombre de visiteurs depuis janvier 2005 :